L’émotion : ma tristesse, ma meilleure amie

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Le 15 octobre 2015, lors d’un rendez-vous avec une psychologue de la SAVIF, le terme viol conjugal est tombé. Je me suis enveloppée d’une immense tristesse.

Abasourdie, je n’y ai d’abord pas cru. Puis peu à peu, les idées se sont remises en place. A ce moment-là, j’ai eu l’image d’un château de carte que la main de mon ex (qui est mon agresseur) faisait tomber d’une pichenette. Ce château de carte, c’était moi! A l’instant où il s’est écroulé, je me suis sentie sombrer.

Lire : Un parcours vers le viol

Je n’avais alors envie plus que d’une seule chose. J’avais envie, comme on peut avoir envie de chocolat, d’être triste. Tout mon être me demandait d’accueillir complètement ce chagrin. Alors, j’ai écouté.
A ce moment-là, une autre image m’est apparue. Celle d’une cape qui descendait du ciel vers moi. Elle est arrivée jusqu’à mes épaules. Et à mesure que je la voyais fondre en moi, je sentais peu à peu la tristesse m’emplir. Je sentais qu’elle et moi, ne faisions plus qu’un et que nous cohabitions dans mon corps d’égale à égale.

Elle y avait toute sa place et toute sa légitimité.

En l’accueillant sans jugement, ni volonté de la fuir, la douleur qu’elle me causait restait supportable et même vivable. Je me levais, mangeais, travaillais et m’occupais de mon petit garçon avec calme et dignité. Je restais capable de gérer mon quotidien et mon emploi de travailleuse sociale sans amalgame, ni projection sur autrui.

Le plus étonnant, c’est qu’ainsi, « elle » me laissait tranquille. Ma tristesse ne se manifestait jamais à des moments gênants. Je pleurais à chaudes larmes sur le trajet du travail ou de la maison, quand j’étais seule. Jamais au bureau ou devant mon fils.

J’aimais ma tristesse qui représentait, pour moi, une amie compatissante et à l’écoute. Après tout, l’homme que j’aimais à cette époque, m’avait violée. Cette émotion coulait de source et j’y avais droit! Ainsi, mon amertume et moi avons fait route ensemble tranquillement sans interruption, pendant six mois. Puis, ayant suffisamment eu le temps et la possibilité de s’exprimer sans lutte, ma cape de tristesse s’est soudainement envolée. Elle m’a laissé libre pour autre chose. Je l’ai laissé partir sans la retenir, avec gratitude pour sa compagnie et avec soulagement, de pouvoir vivre d’autres émotions plus douces et plus agréables.

C’est avec gratitude que j’ai vécu cette expérience, car j’ai appris à quel point les émotions ont besoin d’être vécues à travers le corps pour pouvoir se détacher.

Je suis fière et heureuse d’avoir décidé d’accepter de me vêtir de cette cape, car j’ai finalement réussi à digérer la plus grosse partie de mon chagrin, sans trop de dégâts, en à peine six mois! Si j’avais cherché à lutter, j’en aurais sûrement eu encore pour des années!

Depuis cet épisode, j’accueille autant que je le peux mes ressentis. Ce n’est pas parfait et je ne règle pas tout comme ça, mais une bonne partie de mes conflits intérieurs, en tout cas!

Je ne peux que vous encouragez à faire de même :

« Car aussi douloureux que cela puisse être, accueillir son chagrin pleinement l’adoucira, réduira son intensité et le résorbera plus vite que si vous cherchez à l‘éviter. »

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